samedi 31 janvier 2009

Bienvenue dans le monde des limites floues

Est-ce que poster un article par courriel à un journal peut être assimilé à l’action de franchir la ligne de piquetage?

Question intéressante n’est-ce pas?

On a beau parler de Web 2.0, de blogosphère, de journalisme citoyen, on peut dire qu’on est encore qu’à l’aube de la transformation que l’internet continue opérer sur la société et les gens qui la constituent.

Tout comme l’australopithèque, qui a réussi à inventer le feu (où plus précisément à le maitriser à volonté) il y a 1.4 millions d’années, ne pouvait imaginer que ce geste conduirait au cancer du poumon, à la bombe d’Hiroshima, ou les premiers pas de l’Homme sur la lune, on ne peut imaginer comment l’élimination de la nécessité de continuité physique ou temporel dans les activités humaines vont bouleverser toute la conception des relations humaines.

En effet, il n’y a pas si longtemps, l’impossibilité de l’ubiquité pour tout être humain, i.e. ne pas pouvoir être à deux endroits en même temps, pouvait représenter une défense valable en justice. C’est le concept de l’alibi. « Je ne peux avoir volé votre argent chez vous puisque j’étais ailleurs à ce moment-là! »

Pourtant, aujourd’hui on sait qu’on peut pirater à distance un ordinateur contenant de l’information de crédit sensible et s’en servir à l’autre bout de la planète la microseconde plus tard. On appelle ça la télé-fraude.

Un ordinateur et son contenu, c’est privé. La ligne de téléphone c’est privé. Un ordinateur qui utilise une ligne téléphonique pour contacter un autre ordinateur, c’est l’internet et c’est public. Étrange non?

Deux ordinateurs qui utilisent l’internet, public, qui font du partage de fichier, communément appelé P2P (ou Poste à Poste), c’est considéré privé mais Bell se réserve le droit de limiter la bande passante de cette communication. Régulation d’une communication privée dans un espace public. Pourtant, la navigation de page web en zone sécurisé (https) aussi c’est une communication privée dans un espace public mais la bande passante n’est pas restreinte. Même si la communication sécurisée sert à télécharger des fichiers privés, d’un poste à l’autre. ?!? Étrange.

Faire une marche de protestation dans les rues de Montréal avec une cagoule serait interdite mais on peut faire des commentaires haineux dans un blog sous le couvert de l’anonymat. Hum!

Saviez-vous que vous ne pouvez envoyer un courriel avec une clé d’encryptions de plus grande que 56 bits à l’extérieur de l’Amérique sans que ce ne soit considéré comme un acte d’espionnage voire un acte de guerre?

Le Journal de Montréal est en lockout mais ça n’empêche pas l’ancien premier ministre Bernard Landry de continuer à y écrire des articles, lui qui en 1977 a voté la loi anti-scab, une loi formidable selon ses propres commentaires. Bien qu’il n’est pas « physiquement » travaillé dans l’enceinte de l’entreprise, ça ressemble bien en une activité de scab ça. Attention M. Landry!
Il y a des pentes suspectes à voir venir...

Le web, les courriels, l’internet dans son entier est en train de défier les règles de la société. Nous vivons maintenant dans un monde où liberté d’expression côtoie un monde où d’un même geste on bafoue les droits d’auteurs.

On est en train de changer le monde où l'on vit. On va avoir besoin des gens d’imagination bientôt si on ne veut pas que cette liberté chérie ne devienne chaos ou dictature électronique.

vendredi 30 janvier 2009

Rideau!

Extrait de Ruy Blas de Victor Hugo, acte III scène II

[Ruy Blas, survenant.]

Bon appétit, messieurs!

[Tous se retournent. Silence de surprise et d’inquiétude. Ruy Blas se couvre, croise les bras, et poursuit en les regardant en face.]

Ô ministres intègres! Conseillers vertueux! Voilà votre façon de servir, serviteurs qui pillez la maison! Donc vous n’avez pas honte et vous choisissez l’heure, l’heure sombre où l’Espagne agonisante pleure! Donc vous n’avez ici pas d’autres intérêts que remplir votre poche et vous enfuir après! Soyez flétris, devant votre pays qui tombe, fossoyeurs qui venez le voler dans sa tombe!

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La vie est une pièce de théâtre ne trouvez-vous pas?

Et comme au théâtre, les tombées de rideau entre les actes sont toujours dramatiques. Surtout quand cela se traduit par des pertes d’emplois. Aux États-Unis, en novembre et décembre combiné, on dépasse déjà le million d’emplois supprimés par le secteur privé.


Le double de ce que les analystes prévoyaient. Remarquez que les analystes ne prévoyaient pas de crise non plus pas plus tard que l’an passé.


Juillet 2007

« L'industrie financière a connu de véritables révolutions depuis la fin des années 1990 : sa résistance aux retournements de tendance s'est améliorée, réduisant les risques de système. Le danger d'une explosion financière, et donc le besoin de régulation, n'est peut-être pas si grand qu'on ne le pense. »
http://www.lesechos.fr/info/analyses/4604227.htm?xtor=RSS-2054


Bon. Mais comme au théâtre, tous n’ont pas le premier rôle et certains s’en tirent même avec plus leur cote part. Véritable prime à l’incompétence, voilà que les dirigeants de grandes institutions bancaires se sont vu offrir des primes de « séparations » évaluées à 18 milliards $US. Bien qu’issues de négociation d’embauche bien légitime, ces primes ont un goût amer pour les contribuables qui doivent pourtant par leurs impôts renflouer ces mêmes institutions. Il me semble que dans des cas aussi patent d’échec, on pourrait surement être en droit de s’assurer qu’on ne trouverait pas de vices dans ces clauses de contrats d’embauche. Si ces primes visent à attirer les meilleurs à ces postes de prestige, on ne peut surement pas prétendre que ces candidats, à posteriori, aient vraiment correspondus aux profils attendus. Eussent-t-ils été les meilleurs qu’on ne serait surement pas dans cette situation là à l’heure qu’il est, non?


On verra si Obama, qui qualifie ces primes « de honteux », saura être à la hauteur de ses admirateurs et agira avec les mains libres, et ce même en dépit du succès de financement qu’il a obtenu pour supporter son élection. Qui sait entre l’opinion publique et la voix (lire argent!) de ses commanditaires prévaudra, le match des conflits d’intérêts risque d’être intéressant.


Moi, j’engagerais bien un avocat pour examiner les failles de ces clauses d’embauche à ces postes de prestige. Payé sur un pourcentage des primes, indument versées, récupérées, je suis sûr que je pourrais trouver le meilleur…