dimanche 30 janvier 2011

Mmmmm? Oui, oui, je t’écoute…

Un jour que je déjeunais chez Cora, j’observais un couple à la table voisine. Elle, penchée sur le journal, à faire un sudoku, lui, entière plongé dans l’écran de son téléphone, à répondre à ses courriels. Ça fait un bon dix minutes qu’ils n’ont pas dit un mot.

La serveuse approche de la table avec son pot de café. “On réchauffe votre café?”, dit-elle.

Aucune réaction.

La serveuse répète… La femme lève la tête si rapidement que la serveuse sursaute. Toute la table éclate alors de rire.

Compagnon de vie. Du latin companionem, de com (ensemble) et de panis (le pain). Ceux avec qui on partage le pain. Eux, à côté ne partagent guère plus que la même table on dirait.

Pourtant, il y avait communication. Il retournait ses courriels.

À tous les jours dans l’autobus, je vois des gens qui sont tous ensemble et qui communiquent. Ils communiquent mais pas entre eux. Celui-ci texte, l’autre parle à son cellulaire. Celle-ci change son statut sur Facebook. Je ne compte plus ceux qui twittent. (On conjuge ça comment twitter au plus que parfait du subjonctif?)

Il y a aujourd’hui un coupure en communication et présence physique. Il n’y a même plus nécessité de simultanéité. J’ai un ami qui m’a dit qu’il avait un nouvel emploi à Québec. “Tu déménage?”, je lui dis. Non, non, je vais travailler de chez moi.

Les nouvelles technologies changent bien des choses dans la vie moderne.

Il y en a même qui disent l’internet c’est maintenant de l’ordinaire, une chose banale, prise pour acquis.

Faux…

On n’a rien qu’à voir ce qui se passe en Égypte ces temps-ci. Un dirigeant qui n’arrive plus à rester connecté avec sa population. La population s’agite, réclame, manifeste. Assez, c’est assez. Les troubles s’installent. Que fait le gouvernement?

Il coupe l’internet et les services cellulaires.

Du jamais vu, nulle part. Les dictatures ont ce point en commun, c’est le contrôle de leur image face au monde entier. Pas question qu’il y ait des images et de reportages “citoyens”, photos et vidéos des cellulaires sur You-Tube montrant l’armée et les chars du Pharaon moderne dans les rues du Caire. Pas de retour d’information de la communauté mondiale vers la population via Twitter.

Le trou noir de communication.

Comme mon couple chez Cora, la paix semblait apparente. Un évènement soudain peut amener toute une population en ébullition. Ça grognait depuis longtemps. La récession, les hausses de prix de l’essence, des denrées alimentaires de base. Le gouvernement fait des chambardements fiscales. Puis le soulèvement populaire chez leur voisin, la Tunisie. Un soulèvement qui permet de chasser le président. C’est comme un signal de départ, un déclencheur, une cascade d’évènements. Puis la vague atteint l’Égypte…

Avec l’internet, les infos vont plus vite qu’avant. Beaucoup plus vite qu’avant.

Le gouvernement égyptien semble ne pas avoir su garder le contact avec sa population. C’est important de garder le contact. Surtout dans les périodes difficiles.

Être présent à l’autre. Partager le pain…

Pas juste les miettes…